Père Justin-Sylvestre KetteSoutenance de thèse
Diocèse de BossangoaEntretien avec Mgr Nestor-Désiré Nongo
Diocèse de Dassa-ZouméUne journée avec Mgr François Gnonhossou
Tenez-vous prêts…
Dix-neuvième Dimanche Ordinaire C
11 août 2019
Première lecture
Lecture du livre de la Sagesse
« En même temps que tu frappais nos adversaires, tu nous appelais à la gloire. » (Sg 18, 6-9)
La nuit de la délivrance pascale avait été connue d’avance par nos Pères ; assurés des promesses auxquelles ils avaient cru, ils étaient dans la joie. Et ton peuple accueillit à la fois le salut des justes et la ruine de leurs ennemis. En même temps que tu frappais nos adversaires, tu nous appelais à la gloire. Dans le secret de leurs maisons, les fidèles descendants des justes offraient un sacrifice, et ils consacrèrent d’un commun accord cette loi divine : que les saints partageraient aussi bien le meilleur que le pire ; et déjà ils entonnaient les chants de louange des Pères.
Psaume
(Ps 32 (33), 1.12, 18-19,20.22)
R/ Heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu.
Criez de joie pour le Seigneur, hommes justes !
Hommes droits, à vous la louange !
Heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu,
heureuse la nation qu’il s’est choisie pour domaine !
Dieu veille sur ceux qui le craignent,
qui mettent leur espoir en son amour,
pour les délivrer de la mort,
les garder en vie aux jours de famine.
Nous attendons notre vie du Seigneur :
il est pour nous un appui, un bouclier.
Que ton amour, Seigneur, soit sur nous
comme notre espoir est en toi !
Deuxième lecture
Lecture de la lettre aux Hébreux
« Abraham attendait la ville dont le Seigneur lui-même est le bâtisseur et l’architecte. » (He 11, 1-2.8-19)
Frères,
la foi est une façon de posséder ce que l’on espère, un moyen de connaître des réalités qu’on ne voit pas. Et quand l’Écriture rend témoignage aux anciens, c’est à cause de leur foi. Grâce à la foi, Abraham obéit à l’appel de Dieu : il partit vers un pays qu’il devait recevoir en héritage, et il partit sans savoir où il allait. Grâce à la foi, il vint séjourner en immigré dans la Terre promise, comme en terre étrangère ; il vivait sous la tente, ainsi qu’Isaac et Jacob, héritiers de la même promesse, car il attendait la ville qui aurait de vraies fondations, la ville dont Dieu lui-même est le bâtisseur et l’architecte. Grâce à la foi, Sara, elle aussi, malgré son âge, fut rendue capable d’être à l’origine d’une descendance parce qu’elle pensait que Dieu est fidèle à ses promesses. C’est pourquoi, d’un seul homme, déjà marqué par la mort, a pu naître une descendance aussi nombreuse que les étoiles du ciel et que le sable au bord de la mer, une multitude innombrable.
C’est dans la foi, sans avoir connu la réalisation des promesses, qu’ils sont tous morts ; mais ils l’avaient vue et saluée de loin, affirmant que, sur la terre, ils étaient des étrangers et des voyageurs. Or, parler ainsi, c’est montrer clairement qu’on est à la recherche d’une patrie. S’ils avaient songé à celle qu’ils avaient quittée, ils auraient eu la possibilité d’y revenir. En fait, ils aspiraient à une patrie meilleure, celle des cieux. Aussi Dieu n’a pas honte d’être appelé leur Dieu, puisqu’il leur a préparé une ville.
Grâce à la foi, quand il fut soumis à l’épreuve, Abraham offrit Isaac en sacrifice. Et il offrait le fils unique, alors qu’il avait reçu les promesses et entendu cette parole : C’est par Isaac qu’une descendance portera ton nom. Il pensait en effet que Dieu est capable même de ressusciter les morts ; c’est pourquoi son fils lui fut rendu : il y a là une préfiguration.
Évangile
« Vous aussi, tenez-vous prêts. » (Lc 12, 32-48)
Acclamation :
Alléluia. Alléluia. Veillez, tenez-vous prêts : c’est à l’heure où vous n’y pensez pas que le Fils de l’homme viendra. Alléluia[1].
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Sois sans crainte, petit troupeau : votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume. Vendez ce que vous possédez et donnez-le en aumône. Faites-vous des bourses qui ne s’usent pas, un trésor inépuisable dans les cieux, là où le voleur n’approche pas, où la mite ne détruit pas. Car là où est votre trésor, là aussi sera votre cœur. Restez en tenue de service, votre ceinture autour des reins, et vos lampes allumées. Soyez comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces, pour lui ouvrir dès qu’il arrivera et frappera à la porte. Heureux ces serviteurs-là que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller. Amen, je vous le dis : c’est lui qui, la ceinture autour des reins, les fera prendre place à table et passera pour les servir. S’il revient vers minuit ou vers trois heures du matin et qu’il les trouve ainsi, heureux sont-ils ! Vous le savez bien : si le maître de maison avait su à quelle heure le voleur viendrait, il n’aurait pas laissé percer le mur de sa maison. Vous aussi, tenez-vous prêts : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. » Pierre dit alors : « Seigneur, est-ce pour nous que tu dis cette parabole, ou bien pour tous ? » Le Seigneur répondit : « Que dire de l’intendant fidèle et sensé à qui le maître confiera la charge de son personnel pour distribuer, en temps voulu, la ration de nourriture ? Heureux ce serviteur que son maître, en arrivant, trouvera en train d’agir ainsi ! Vraiment, je vous le déclare : il l’établira sur tous ses biens. Mais si le serviteur se dit en lui-même : Mon maître tarde à venir, et s’il se met à frapper les serviteurs et les servantes, à manger, à boire et à s’enivrer, alors quand le maître viendra, le jour où son serviteur ne s’y attend pas et à l’heure qu’il ne connaît pas, il l’écartera et lui fera partager le sort des infidèles. Le serviteur qui, connaissant la volonté de son maître, n’a rien préparé et n’a pas accompli cette volonté, recevra un grand nombre de coups. Mais celui qui ne la connaissait pas, et qui a mérité des coups pour sa conduite, celui-là n’en recevra qu’un petit nombre. À qui l’on a beaucoup donné, on demandera beaucoup ; à qui l’on a beaucoup confié, on réclamera davantage. »
Textes liturgiques © AELF
Homélie
Tenez-vous prêts…
Pour saisir les textes de ce dimanche il faut se référer au Notre Père dans ses deux parties. La première est le souhait et la promesse que vienne le règne de Dieu en ce monde. Or, le « règne de Dieu », c’est Jésus qui nous l’a apporté, et va toujours continuer à l’apporter, à la condition que la volonté du Père soit faite : son règne viendra si nous faisons sa volonté.
La deuxième partie est la demande du DON de Dieu, le pain et le pardon, la volonté de sortir de soi-même et de l’égoïsme qui est la base de toutes nos tentations.
Ainsi, l’ancienne alliance est la présence de Dieu qui agit. En effet, il crée l’homme. Ensuite, il constitue un peuple par Abraham, il libère ce peuple de sa captivité en Egypte et le conduit en cette terre qu’il lui avait promise. Quelle étrange idée que de promettre une terre à une peuplade ! Mais cette peuplade était un « ramassis » de bergers sans terre, toujours à la recherche d’eau et de nourriture pour ses troupeaux. Et sur les terres des cultivateurs, qui plus est, ce qui était source de conflit permanent et de guerres. En outre, la faim les tiraillait souvent, d’autant plus que les oasis étaient rares en ces régions arides. Pourtant, ces élus de Dieu, ce peuple à la nuque raide selon le dire du prophète, invectivaient leur Dieu alors qu’il les nourrissait généreusement, tirant l’eau d’un gros rocher et leur envoyant la galette du jour, accompagnée d’une caille pour compléter la menu !
Mais tout cela est aujourd’hui terminé, parce que l’homme, avec le temps, est devenu, ou aurait dû devenir, adulte et responsable ; que Dieu, par Jésus-Christ, lui a confié la terre entière, un monde à construire sur le modèle de l’Écriture, de l’évangile surtout. Ce qui est loin d’être arrivé...
Aussi, au travers de ces textes, Dieu nous dit-il : « Vous êtes souvent dans l’erreur, vous les humains. Car vous ne cultivez pas la terre mais vous l’exploitez selon vos intérêts. Votre société n’est construite ni sur la justice ni sur le respect, mais vous soumettez l’homme à vos politiques, vous l’escroquez et le spoliez par vos promesses fallacieuses. »
Alors vous autres, qui voulez bien être les vrais disciples de Jésus, revêtez donc votre tenue de disciple pour bâtir un monde selon la volonté du Père. Un monde où chacun pourra manger à sa faim et vivre une vie décente, un monde où la haine de l’autre sera bientôt éradiquée. Rude programme il est vrai, initié par l’envoi en mission du Fils de Dieu, qui y a laissé sa vie. Un programme qui est loin d’être facile… Mais il fait appel à tout homme et femme de bonne volonté qui croit en cette prière du Notre Père qu’ont tant de fois récité des personnes qui n’étaient pas toujours en tenue de service. A chacun de voir…
Jean-Pierre FREY, sma
[1] Cf. Mt 24, 42a. 44.
La vie de quelqu’un ne dépend pas de ce qu’il possède.
Dix-huitième Dimanche Ordinaire C
4 août 2019
Première lecture
Lecture du livre de Qohèleth
« Que reste-t-il à l’homme de toute sa peine ? » (Qo 1, 2 ; 2, 21-23)
Lecture du livre de Vanité des vanités, disait Qohèleth. Vanité des vanités, tout est vanité ! Un homme s’est donné de la peine ; il est avisé, il s’y connaissait, il a réussi. Et voilà qu’il doit laisser son bien à quelqu’un qui ne s’est donné aucune peine. Cela aussi n’est que vanité, c’est un grand mal ! En effet, que reste-t-il à l’homme de toute la peine et de tous les calculs pour lesquels il se fatigue sous le soleil ? Tous ses jours sont autant de souffrances, ses occupations sont autant de tourments : même la nuit, son cœur n’a pas de repos. Cela aussi n’est que vanité.
Psaume
(Ps 89 (90), 3-4, 5-6, 12-13, 14.17abc)
R/ D’âge en âge, Seigneur, tu as été notre refuge.
Tu fais retourner l’homme à la poussière ;
tu as dit : « Retournez, fils d’Adam ! »
À tes yeux, mille ans sont comme hier,
c’est un jour qui s’en va, une heure dans la nuit.
Tu les as balayés : ce n’est qu’un songe ;
dès le matin, c’est une herbe changeante :
elle fleurit le matin, elle change ;
le soir, elle est fanée, desséchée.
Apprends-nous la vraie mesure de nos jours :
que nos cœurs pénètrent la sagesse.
Reviens, Seigneur, pourquoi tarder ?
Ravise-toi par égard pour tes serviteurs.
Rassasie-nous de ton amour au matin,
que nous passions nos jours dans la joie et les chants.
Que vienne sur nous la douceur du Seigneur notre Dieu !
Consolide pour nous l’ouvrage de nos mains.
Deuxième lecture
Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Colossiens
« Recherchez les réalités d’en haut ; c’est là qu’est le Christ. » (Col 3, 1-5.9-11)
Frères,
si donc vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu. Pensez aux réalités d’en haut, non à celles de la terre. En effet, vous êtes passés par la mort, et votre vie reste cachée avec le Christ en Dieu. Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui dans la gloire. Faites donc mourir en vous ce qui n’appartient qu’à la terre : débauche, impureté, passion, désir mauvais, et cette soif de posséder, qui est une idolâtrie. Plus de mensonge entre vous : vous vous êtes débarrassés de l’homme ancien qui était en vous et de ses façons d’agir, et vous vous êtes revêtus de l’homme nouveau qui, pour se conformer à l’image de son Créateur, se renouvelle sans cesse en vue de la pleine connaissance. Ainsi, il n’y a plus le païen et le Juif, le circoncis et l’incirconcis, il n’y a plus le barbare ou le primitif, l’esclave et l’homme libre ; mais il y a le Christ : il est tout, et en tous.
Évangile
« Ce que tu auras accumulé, qui l’aura ? » (Lc 12, 13-21)
Acclamation :
Alléluia. Alléluia. Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux ! Alléluia[1].
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là, du milieu de la foule, quelqu’un demanda à Jésus : « Maître, dis à mon frère de partager avec moi notre héritage. » Jésus lui répondit : « Homme, qui donc m’a établi pour être votre juge ou l’arbitre de vos partages ? » Puis, s’adressant à tous : « Gardez-vous bien de toute avidité, car la vie de quelqu’un, même dans l’abondance, ne dépend pas de ce qu’il possède. » Et il leur dit cette parabole : « Il y avait un homme riche, dont le domaine avait bien rapporté. Il se demandait : Que vais-je faire ? Car je n’ai pas de place pour mettre ma récolte. Puis il se dit : Voici ce que je vais faire : je vais démolir mes greniers, j’en construirai de plus grands et j’y mettrai tout mon blé et tous mes biens. Alors je me dirai à moi-même : Te voilà donc avec de nombreux biens à ta disposition, pour de nombreuses années. Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence. Mais Dieu lui dit : Tu es fou : cette nuit même, on va te redemander ta vie. Et ce que tu auras accumulé, qui l’aura ? Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu. »
Textes liturgiques © AELF
Homélie
« La vie de quelqu’un, même dans l’abondance, ne dépend pas de ce qu’il possède[2]. »
Le message véhiculé par les textes de ce jour est clair, mais exigeant : se détacher des richesses matérielles pour nous orienter vers un autre trésor, se garder de toute avidité, réaliser une fraternité nouvelle en Christ.
« Tout est vanité », rappelle Qohèleth, résumant ainsi sa pensée. Ce livre de sagesse est une collection de réflexions sur la vie humaine ; sa publication finale vient à la fin de l’histoire de l’Ancien Testament. L’extrait qui sert de deuxième lecture, décrit ce qui se passe souvent chez les humains, ils se donnent de la peine pour acquérir des biens et se ménager une vie confortable, mais finalement ils sont obligés de laisser leurs biens et leurs affaires à d’autres qui n’en prennent guère soin, ils se sont ainsi fatigués pour rien… Ils laissent derrière eux tout ce qu’ils ont accumulé pour suivre le chemin de tout le monde.*
Dans l’évangile, une personne fait appel à la sagesse de Jésus pour lui demander d’arbitrer l’héritage que deux frères veulent se partager. Mais ce genre d’affaire n’entre pas dans le ministère de Jésus. Cette demande lui permet cependant de continuer son discours sur la confiance. Il en profite pour adresser à la foule un avertissement radical contre la cupidité : « Gardez-vous de toute avidité, car la vie de quelqu’un, même dans l’abondance, ne dépend pas de ce qu’il possède ».
Jésus illustre ensuite son propos avec la parabole du riche insensé qui cherche des moyens pour accumuler le plus de richesses possible. La richesse est illusoire, c’est Dieu qui donne la vie à chaque instant et cette vie peut se terminer tout d’un coup. Une contrepartie au dénouement de cette parabole est donnée dans les versets qui suivent le texte d’aujourd’hui avec l’idée que, même si on se retrouve sans bien, Dieu continue à donner la vie. Se préoccuper de ses vêtements et de la nourriture qu’il nous revient de manger est secondaire. Les oiseaux et les herbes des champs y parviennent naturellement. Jésus n’invite pas à la paresse ou à l’insouciance, mais il veut libérer ses disciples d’une inquiétude inutile. Plus loi, il les invitera aussi, comme il l’avait fait pour les pharisiens, à donner leurs biens aux pauvres, ce qui les fait grandir dans la confiance en Dieu et dans leur dépendance à son égard.
Ce qui compte finalement, c’est de « rechercher les réalités d’en haut », comme dit l’auteur de la lettre aux Colossiens dans la deuxième lecture, et d’entrer dans la dynamique du baptême qui nous fait passer dès maintenant à la vie en Christ. Rechercher les réalités d’en haut, c’est nous laisser purifier de tout ce qui nous retient à la terre et nous empêche de nous réaliser pleinement, « débauche, impureté, passion, désir mauvais ». L’auteur y ajoute « cette soif de posséder » qu’il définit comme « une idolâtrie ». Ainsi, il va plus loin que Qohèleth affirmant que tout est vanité. Ce qui est à rechercher, et ce pourquoi il faut travailler, c’est de se conformer à cette réalité nouvelle qu’est le Christ ressuscité, de se rendre conforme à l’image de Dieu Créateur, de travailler à ce que tous puissent s’intégrer à Jésus Christ et réaliser avec lui une fraternité harmonieuse où tous se sentent à l’aise, sans différence de race, de rite religieux, de culture, où tout est simplement le Christ.
Jean-Marie GUILLAUME, sma
[1] Cf. Mt 5, 3.
[2] Luc, 12, 15.
Quand vous priez, dites…
Dix-septième Dimanche Ordinaire C
28 juillet 2020
Première lecture
Lecture du livre de la Genèse
« Que mon Seigneur ne se mette pas en colère si j’ose parler encore. » (Gn 18, 20-32)
En ces jours-là, les trois visiteurs d’Abraham allaient partir pour Sodome. Alors le Seigneur dit : « Comme elle est grande, la clameur au sujet de Sodome et de Gomorrhe ! Et leur faute, comme elle est lourde ! Je veux descendre pour voir si leur conduite correspond à la clameur venue jusqu’à moi. Si c’est faux, je le reconnaîtrai. » Les hommes se dirigèrent vers Sodome, tandis qu’Abraham demeurait devant le Seigneur. Abraham s’approcha et dit : « Vas-tu vraiment faire périr le juste avec le coupable ? Peut-être y a-t-il cinquante justes dans la ville. Vas-tu vraiment les faire périr ? Ne pardonneras-tu pas à toute la ville à cause des cinquante justes qui s’y trouvent ? Loin de toi de faire une chose pareille ! Faire mourir le juste avec le coupable, traiter le juste de la même manière que le coupable, loin de toi d’agir ainsi ! Celui qui juge toute la terre n’agirait-il pas selon le droit ? » Le Seigneur déclara : « Si je trouve cinquante justes dans Sodome, à cause d’eux je pardonnerai à toute la ville. » Abraham répondit : « J’ose encore parler à mon Seigneur, moi qui suis poussière et cendre. Peut-être, sur les cinquante justes, en manquera-t-il cinq : pour ces cinq-là, vas-tu détruire toute la ville ? » Il déclara : « Non, je ne la détruirai pas, si j’en trouve quarante-cinq. » Abraham insista : « Peut-être s’en trouvera-t-il seulement quarante ? » Le Seigneur déclara : « Pour quarante, je ne le ferai pas. » Abraham dit : « Que mon Seigneur ne se mette pas en colère, si j’ose parler encore. Peut-être s’en trouvera-t-il seulement trente ? » Il déclara : « Si j’en trouve trente, je ne le ferai pas. » Abraham dit alors : « J’ose encore parler à mon Seigneur. Peut-être s’en trouvera-t-il seulement vingt ? » Il déclara : « Pour vingt, je ne détruirai pas. » Il dit : « Que mon Seigneur ne se mette pas en colère : je ne parlerai plus qu’une fois. Peut-être s’en trouvera-t-il seulement dix ? » Et le Seigneur déclara : « Pour dix, je ne détruirai pas. »
Psaume
(Ps 137 (138), 1-2a, 2bc-3, 6-7ab, 7c-8)
R/ Le jour où je t’appelle, réponds-moi, Seigneur.
De tout mon cœur, Seigneur, je te rends grâce :
tu as entendu les paroles de ma bouche.
Je te chante en présence des anges,
vers ton temple sacré, je me prosterne.
Je rends grâce à ton nom pour ton amour et ta vérité,
car tu élèves, au-dessus de tout, ton nom et ta parole.
Le jour où tu répondis à mon appel,
tu fis grandir en mon âme la force.
Si haut que soit le Seigneur, il voit le plus humble ;
de loin, il reconnaît l’orgueilleux.
Si je marche au milieu des angoisses, tu me fais vivre,
ta main s’abat sur mes ennemis en colère.
Ta droite me rend vainqueur.
Le Seigneur fait tout pour moi !
Seigneur, éternel est ton amour :
n’arrête pas l’œuvre de tes mains.
Deuxième lecture
Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Colossiens
« Dieu vous a donné la vie avec le Christ, il nous a pardonné toutes nos fautes. » (Col 2, 12-14)
Frères, dans le baptême, vous avez été mis au tombeau avec le Christ et vous êtes ressuscités avec lui par la foi en la force de Dieu qui l'a ressuscité d’entre les morts. Vous étiez des morts, parce que vous aviez commis des fautes et n’aviez pas reçu de circoncision dans votre chair. Mais Dieu vous a donné la vie avec le Christ : il nous a pardonné toutes nos fautes. Il a effacé le billet de la dette qui nous accablait en raison des prescriptions légales pesant sur nous : il l’a annulé en le clouant à la croix.
Évangile
« Demandez, on vous donnera. » (Lc 11, 1-13)
Acclamation :
Alléluia. Alléluia. Vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils ; c’est en lui que nous crions « Abba », Père. Alléluia[1].
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
Il arriva que Jésus, en un certain lieu, était en prière. Quand il eut terminé, un de ses disciples lui demanda : « Seigneur, apprends-nous à prier, comme Jean le Baptiste, lui aussi, l’a appris à ses disciples ». Il leur répondit : « Quand vous priez, dites : Père, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne. Donne-nous le pain dont nous avons besoin pour chaque jour Pardonne-nous nos péchés, car nous-mêmes, nous pardonnons aussi à tous ceux qui ont des torts envers nous. Et ne nous laisse pas entrer en tentation. »
Jésus leur dit encore : « Imaginez que l’un de vous ait un ami et aille le trouver au milieu de la nuit pour lui demander : Mon ami, prête-moi trois pains, car un de mes amis est arrivé de voyage chez moi, et je n’ai rien à lui offrir. Et si, de l’intérieur, l’autre lui répond : Ne viens pas m’importuner ! La porte est déjà fermée ; mes enfants et moi, nous sommes couchés. Je ne puis pas me lever pour te donner quelque chose. Eh bien ! je vous le dis : même s’il ne se lève pas pour donner par amitié, il se lèvera à cause du sans-gêne de cet ami, et il lui donnera tout ce qu’il lui faut. Moi, je vous dis : Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira. Quel père parmi vous, quand son fils lui demande un poisson, lui donnera un serpent au lieu du poisson ? ou lui donnera un scorpion quand il demande un œuf ? Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! »
Textes liturgiques © AELF
Homélie
Quand vous priez, dites…
Nous ferions de drôles de figures, frères et sœurs, si nos enfants s'adressaient à nous toujours par les mêmes paroles, des paroles empruntées à d'autres, des paroles au style ampoulé et ronflant derrière lequel on sentirait manifestement que ce ne sont pas vraiment eux qui parlent. Pour dire vrai, nous ne serions, à coup sûr, pas très heureux.
Mais alors, pourquoi infligeons-nous cela à Dieu ? N'est ce pas un peu comme cela que nous lui parlons, nous, ses enfants, en copiant ailleurs, en prenant des formules toutes faites que bien souvent nous rabâchons sans même y prêter beaucoup d'attention... La prière, ce n'est pas cela, ce n'est pas seulement des formules. La prière est avant tout un parler vrai, une conversation avec un père à qui nous disons d'abord notre affection, à qui nous souhaitons tout ce qui peut lui faire le plus plaisir, un père à qui nous exposons nos misères, nos besoins ainsi que ceux de nos frères, un père à qui nous n’oublions pas de dire merci... et tout cela avec des mots de tous les jours, avec nos mots à nous et notre manière de les dire.
La première lecture nous en donne d'ailleurs un très bon exemple. On se croirait presque dans un souk oriental où deux hommes marchandent pour faire baisser les prix. Abraham use de tous les arguments pour donner mauvaise conscience à Dieu : « Mais tu ne vas quand même pas faire une chose pareille, faire mourir le juste avec le pécheur... ! » Et de marchandage en marchandage, pour obtenir le salut de Sodome, il fera descendre la balance de 50 justes jusqu'à 10. On parle à Dieu avec ce qu'on est, et à travers la bible on voit même certains s'adresser à lui avec quelque violence… Rappelez-vous le prophète Jérémie qui, découragé et amer de n'avoir à prophétiser à ses concitoyens que des malheurs, reproche à Dieu de n'être pour lui qu'un ruisseau trompeur aux eaux décevantes...
Les apôtres sont avec Jésus depuis assez longtemps pour l'avoir vu se retirer souvent à l'écart pour prier. Ils sont intrigués et l'un d'entre eux s'enhardit et lui demande un jour : « Seigneur, apprends-nous à prier ». Alors arrive la première grande surprise. Contrairement à leur attente, Jésus ne commence pas sa prière par une formule ronflante et creuse dans le style : « Ô toi, tout puissant créateur et maître du ciel et de la terre... ». Non, non, il leur dit : « Quand vous priez, dites à Dieu « papa »... En effet, papa, c'est la traduction exacte du mot Abba. Quand on veut prier, ce mot nous met tout de suite dans la note juste, faite de confiance, de tendresse, de familiarité et de simplicité. En poursuivant la prière, Jésus ne veut pas nous donner une formule figée, il ne fait que de donner un exemple, nous montrer dans quel esprit on parle à Dieu. Bien sûr, en Église, quand nous voulons prier ensemble, il faut bien utiliser les mêmes termes et les mêmes phrases, sinon nous aurions une belle cacophonie. Mais quand nous récitons le Notre Père en particulier, pourquoi ne pas broder, amplifier, actualiser avec nos propres paroles, nos propres besoins, nos propres souhaits ?
Ce qui importe avant tout, c'est que ce que nous disons reste vrai. Il faudrait avoir une certaine dose d'inconscience ou une bonne épaisseur de routine pour répéter, sans sourciller : « Pardonne nos offenses de la même manière que je pardonne à ceux qui m'ont offensé », alors que je ne pardonne pas à tel ou tel de mes frères... Nous nous condamnons alors nous-mêmes ! Ou encore : « Que ton règne vienne » si, pendant des semaines et des mois, je n'ai rien fait pour témoigner de Jésus Christ dans le milieu où je vis et travaille, rien fait pour faire avancer son Règne en moi-même !
« Demandez et vous recevrez », nous dit le Seigneur. Eh bien ! Demandons lui la grâce de la prière, qu'elle soit pour nous un contact habituel avec Lui, que nous lui parlions quoi que nous fassions et où que nous soyons. Lui, il est toujours là, prêt à nous écouter, c'est trop souvent nous qui manquons à l'appel !
Oui, Seigneur, aujourd'hui, apprends nous à prier et à dire à Dieu du fond du coeur: « Père… »
Amen
Cluade RÉMOND, sma
[1] Cf. Rm 8, 15bc .
Dieu attend d’être accueilli.
Seizième Dimanche Ordinaire C
21 juillet 2019
Première lecture
Lecture du livre de la Genèse
« Mon seigneur, ne passe pas sans t’arrêter près de ton serviteur. » (Gn 18, 1-10a)
En ces jours-là, aux chênes de Mambré, le Seigneur apparut à Abraham, qui était assis à l’entrée de la tente. C’était l’heure la plus chaude du jour. Abraham leva les yeux, et il vit trois hommes qui se tenaient debout près de lui. Dès qu’il les vit, il courut à leur rencontre depuis l’entrée de la tente et se prosterna jusqu’à terre. Il dit : « Mon seigneur, si j’ai pu trouver grâce à tes yeux, ne passe pas sans t’arrêter près de ton serviteur. Permettez que l’on vous apporte un peu d’eau, vous vous laverez les pieds, et vous vous étendrez sous cet arbre. Je vais chercher de quoi manger, et vous reprendrez des forces avant d’aller plus loin, puisque vous êtes passés près de votre serviteur ! » Ils répondirent : « Fais comme tu l’as dit. » Abraham se hâta d’aller trouver Sara dans sa tente, et il dit : « Prends vite trois grandes mesures de fleur de farine, pétris la pâte et fais des galettes. » Puis Abraham courut au troupeau, il prit un veau gras et tendre, et le donna à un serviteur, qui se hâta de le préparer. Il prit du fromage blanc, du lait, le veau que l’on avait apprêté, et les déposa devant eux ; il se tenait debout près d’eux, sous l’arbre, pendant qu’ils mangeaient. Ils lui demandèrent : « Où est Sara, ta femme ? » Il répondit : « Elle est à l’intérieur de la tente. » Le voyageur reprit : « Je reviendrai chez toi au temps fixé pour la naissance, et à ce moment-là, Sara, ta femme, aura un fils. »
Psaume
(Ps 14 (15), 2-3a, 3bc-4ab, 4d-5)
R/ Seigneur, qui séjournera sous ta tente ?
Celui qui se conduit parfaitement,
qui agit avec justice
et dit la vérité selon son cœur,
il met un frein à sa langue.
Il ne fait pas de tort à son frère
et n’outrage pas son prochain.
À ses yeux, le réprouvé est méprisable
mais il honore les fidèles du Seigneur.
Il ne reprend pas sa parole.
Il prête son argent sans intérêt,
n’accepte rien qui nuise à l’innocent.
Qui fait ainsi demeure inébranlable.
Deuxième lecture
Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Colossiens
« Le mystère qui était caché depuis toujours mais qui maintenant a été manifesté. » (Col 1, 24-28)
Frères,
maintenant je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour vous ; ce qui reste à souffrir des épreuves du Christ dans ma propre chair, je l’accomplis pour son corps qui est l’Église. De cette Église, je suis devenu ministre, et la mission que Dieu m’a confiée, c’est de mener à bien pour vous l’annonce de sa parole, le mystère qui était caché depuis toujours à toutes les générations, mais qui maintenant a été manifesté à ceux qu’il a sanctifiés. Car Dieu a bien voulu leur faire connaître en quoi consiste la gloire sans prix de ce mystère parmi toutes les nations : le Christ est parmi vous, lui, l’espérance de la gloire ! Ce Christ, nous l’annonçons : nous avertissons tout homme, nous instruisons chacun en toute sagesse, afin de l’amener à sa perfection dans le Christ.
Évangile
« Marthe le reçut. Marie a choisi la meilleure part. » (Lc 10, 38-42)
Acclamation : Alléluia. Alléluia. Heureux ceux qui ont entendu la Parole dans un cœur bon et généreux, qui la retiennent et portent du fruit par leur persévérance. Alléluia[1].
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là, Jésus entra dans un village. Une femme nommée Marthe le reçut. Elle avait une sœur appelée Marie qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole. Quant à Marthe, elle était accaparée par les multiples occupations du service. Elle intervint et dit : « Seigneur, cela ne te fait rien que ma sœur m’ait laissé faire seule le service ? Dis-lui donc de m’aider. » Le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu te donnes du souci et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée. »
Textes liturgiques © AELF
Homélie
Dieu attend d’être accueilli.
Bien-aimés de Dieu,
Dans le livre de l’Apocalypse, nous lisons : « Voici que je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui, et je prendrai le repas avec lui, et lui avec moi[2] ». Jésus a lui aussi, au cours de sa vie terrestre, apprécié la douceur de l’amitié humaine en se faisant accueillir chez Marthe et Marie.
Le « Verbe qui s’est fait chair » et qui veut demeurer chez les hommes a besoin d’être humainement accueilli. Dans l’Évangile de ce jour, nous voyons deux manières d’accueillir de deux sœurs : Marie, assise au pied de Jésus et qui écoutait ; et Marthe, « accaparée par les soucis du service. ». Sans sous-estimer ce que faisait Marthe, Jésus a déclaré que « Marie a choisi la meilleure part qui ne lui sera pas enlevée ». L’écoute de la Parole de Dieu et sa mise en pratique, c’est cela qui fait de ceux qui veulent suivre Jésus, « sa mère, ses frères, ses sœurs, ». Ainsi, l’amitié avec Jésus, la véritable familiarité spirituelle avec lui, commence par l’écoute de sa Parole. Et c’est « la meilleure part » que Marie a choisie par rapport à sa sœur Marthe. Jésus veut nous dire que l’accueil est la première condition de toute vraie rencontre, mais plus particulièrement l’écoute de sa Parole.
La Bible prône de mille manières la valeur religieuse de l’hospitalité. C’est toujours, en quelque sorte, Dieu qu’on reçoit dans l’hôte accueilli. Celui-ci pourrait être, à son insu, porteur du message du Seigneur. Ainsi en fut-il pour Abraham. En recevant les trois hommes, il a reçu Dieu, puisque la parole dont ils sont porteurs s’accomplira, et Sara, sa femme, deviendra enceinte.
L’écoute de la Parole de Dieu dans la foi a et doit garder la priorité absolue. Cela impose, bien sûr, des choix et des renoncements. Il est nécessaire de s’assoir régulièrement au pied du Seigneur Jésus, dans l’attitude du disciple attentif à sa Parole, qu’il faut, ensuite, mettre en pratique au milieu des multiples occupations de la vie et du service des autres.
Rien, pas même les souffrances ou l’inaction imposées par une incarcération, comme les a connus Saint Paul dans la deuxième lecture, la maladie ou les infirmités, rien ne doit détourner de cet accueil primordial du Seigneur, qui doit toujours être le premier servi.
Que chaque Eucharistie soit pour nous l’occasion de l’accueil joyeux du « Verbe de Dieu » et reçue dans la communion à son Corps et en son Sang pour la vie éternelle. Amen.
Abbé Samuel GAMLIGO
[1] Cf. Lc 8, 15.
[2] Ap 3, 20.
Reprenons la route.
Quinzième Dimanche Ordinaire C
14 juillet 2020
Le Bon Samaritain. Vitrail de la cathédrale d'Ely. Photo Dustbinman
Première lecture
Lecture du livre du Deutéronome
« Elle est tout près de toi, cette Parole, afin que tu la mettes en pratique. » (Dt 30, 10-14)
Moïse disait au peuple : « Écoute la voix du Seigneur ton Dieu, en observant ses commandements et ses décrets inscrits dans ce livre de la Loi, et reviens au Seigneur ton Dieu de tout ton cœur et de toute ton âme. Car cette loi que je te prescris aujourd’hui n’est pas au-dessus de tes forces ni hors de ton atteinte. Elle n’est pas dans les cieux, pour que tu dises : Qui montera aux cieux nous la chercher ? Qui nous la fera entendre, afin que nous la mettions en pratique ? Elle n’est pas au-delà des mers, pour que tu dises : Qui se rendra au-delà des mers nous la chercher ? Qui nous la fera entendre, afin que nous la mettions en pratique ? Elle est tout près de toi, cette Parole, elle est dans ta bouche et dans ton cœur, afin que tu la mettes en pratique. »
Psaume
(Ps 68, 14, 17, 30-31, 33-34, 36ab.37)
R/ Cherchez Dieu, vous les humbles et votre cœur vivra.
Moi, je te prie, Seigneur :
c’est l’heure de ta grâce ;
dans ton grand amour, Dieu, réponds-moi,
par ta vérité sauve-moi.
Réponds-moi, Seigneur,
car il est bon, ton amour ;
dans ta grande tendresse,
regarde-moi.
Et moi, humilié, meurtri,
que ton salut, Dieu, me redresse.
Et je louerai le nom de Dieu par un cantique,
je vais le magnifier, lui rendre grâce.
Les pauvres l’ont vu, ils sont en fête :
« Vie et joie, à vous qui cherchez Dieu ! »
Car le Seigneur écoute les humbles,
il n’oublie pas les siens emprisonnés.
Car Dieu viendra sauver Sion
et rebâtir les villes de Juda,
patrimoine pour les descendants de ses serviteurs,
demeure pour ceux qui aiment son nom.
Deuxième lecture
Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Colossiens
« Tout est créé par lui et pour lui. » (Col 1, 15-20)
Le Christ Jésus est l’image du Dieu invisible, le premier-né, avant toute créature : en lui, tout fut créé, dans le ciel et sur la terre. Les êtres visibles et invisibles, Puissances, Principautés, Souverainetés, Dominations, tout est créé par lui et pour lui. Il est avant toute chose, et tout subsiste en lui.
Il est aussi la tête du corps, la tête de l’Église : c’est lui le commencement, le premier-né d’entre les morts, afin qu’il ait en tout la primauté. Car Dieu a jugé bon qu’habite en lui toute plénitude et que tout, par le Christ, lui soit enfin réconcilié, faisant la paix par le sang de sa Croix, la paix pour tous les êtres sur la terre et dans le ciel.
Évangile
« Qui est mon prochain ? » (Lc 10, 25-37)
Acclamation :
Alléluia. Alléluia. Tes paroles, Seigneur, sont esprit et elles sont vie ; tu as les paroles de la vie éternelle. Alléluia[1].
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là, un docteur de la Loi se leva et mit Jésus à l’épreuve en disant : « Maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? » Jésus lui demanda : « Dans la Loi, qu’y a-t-il d’écrit ? Et comment lis-tu ? » L’autre répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ton intelligence, et ton prochain comme toi-même. » Jésus lui dit : « Tu as répondu correctement. Fais ainsi et tu vivras. » Mais lui, voulant se justifier, dit à Jésus : « Et qui est mon prochain ? »
Jésus reprit la parole : « Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba sur des bandits ; ceux-ci, après l’avoir dépouillé et roué de coups, s’en allèrent, le laissant à moitié mort. Par hasard, un prêtre descendait par ce chemin ; il le vit et passa de l’autre côté. De même un lévite arriva à cet endroit ; il le vit et passa de l’autre côté. Mais un Samaritain, qui était en route, arriva près de lui ; il le vit et fut saisi de compassion. Il s’approcha, et pansa ses blessures en y versant de l’huile et du vin ; puis il le chargea sur sa propre monture, le conduisit dans une auberge et prit soin de lui. Le lendemain, il sortit deux pièces d’argent, et les donna à l’aubergiste, en lui disant : Prends soin de lui ; tout ce que tu auras dépensé en plus, je te le rendrai quand je repasserai. Lequel des trois, à ton avis, a été le prochain de l’homme tombé aux mains des bandits ? » Le docteur de la Loi répondit : « Celui qui a fait preuve de pitié envers lui. » Jésus lui dit : « Va, et toi aussi, fais de même. »
Textes liturgiques © AELF
Homélie
Reprenons la route.
Lorsque nous lisons une parabole, très facilement nous nous identifions à l’un ou l’autre personnage. En ce qui concerne l’histoire du bon Samaritain, nous nous retrouvons soit dans le prêtre ou le lévite qui passe, indifférents à celui qui gît sur le bord de la route, et nous nous identifions aussi parfois au bon Samaritain. Mais quoi qu’il en soit, ces interprétations sont toujours très moralisantes et ne correspondent pas du tout à la personnalité de Jésus, qui ne fait jamais la morale ni ne culpabilise celui qui a fait le mal. Jésus veut avant tout être « Bonne Nouvelle » pour tous.
Savoir que je dois aimer mon prochain et venir au secours de celui qui est blessé n’est pas précisément une nouveauté, cela se faisait déjà avant Jésus. Pour comprendre cette parabole comme une Bonne Nouvelle, il faut essayer de trouver d’autres clefs d’interprétation, et le texte retentira tout autrement. Ainsi, par exemple, on peut comprendre que le bon Samaritain représentait le Seigneur, tandis que l’homme blessé sur la route symbolisait l’humanité qui s’éloigne de Jérusalem, le lieu où Dieu habite, pour aller se perdre à Jéricho dans le désert, là où se trouvent les brigands et tout le mal qu’ils représentent. Le prêtre et le lévite qui passent leur chemin, ne sont pas là pour donner une petite touche anticléricale mais parce qu’ils représentent la loi et culte qui sont incapables de sauver l’homme blessé. L’huile dont le Seigneur, le bon Samaritain, se sert pour guérir, c’est l’Esprit, l’huile dont on reçoit l’onction au baptême. Et le vin, c’est évidemment le vin de l’eucharistie. L’auberge, quant à elle représente l’Eglise à qui l’humanité est confiée en attendant le retour du Seigneur.
Un autre détail mérite d’être souligné : après que le Samaritain a exercé sa bonté, il continue sa route. Il précise qu’il repassera pour payer la note à l’aubergiste, mais il ne reste pas, il ne s’attarde pas. En d’autres mots, il ne s’appesantit pas auprès de celui qu’il a remis en route. Il ne fait que le nécessaire, il ne prend pas la victime avec lui, il n’a pas d’attitude paternaliste, il ne dit pas ce qu’il faudrait qu’il fasse désormais… Non ! Il continue sa route. Ceci montre que Dieu est un Dieu de passage, un Dieu en chemin, qui aide ceux qui n’en peuvent plus à reprendre la route.
Le bon Samaritain nous donne un bel exemple du respect du pauvre, du blessé de la vie. Il ne faut pas prendre sa place, ne pas résoudre pour lui le problème de son avenir. Ce n’est pas savoir à sa place, ni ce qu’il a à faire. Il est important de ne pas jouer aux dames patronnesses, il est important de décoloniser notre relation aux pauvres. Ce n’est d’ailleurs pas toujours facile de freiner nos élans de bonté. Mais, à un certain moment, il faut apprendre à s’effacer, à disparaître pour laisser autrui être lui-même et prendre ses responsabilités et sa vie en main. Quant à nous, à l’exemple du Seigneur, le bon Samaritain, il nous faut continuer notre propre voyage, toujours vigilants pour être prêts à aider sur notre route d’autres victimes de la violence et du mal.
Avant de terminer, je voudrais encore mettre l’accent sur la répartie entre le scribe et Jésus. Au scribe qui lui demande « Qui est mon prochain ? », comme si celui-ci était là quelque part à l’attendre, Jésus retourne la question : « De qui veux-tu te faire le prochain ?» C’est à toi de décider, c’est de toi que dépend qui sera ton prochain. Se faire le prochain, c’est prendre soi-même l’initiative de se faire proche de l’autre. C’est un véritable décentrement auquel nous sommes invités. Ce n’est plus moi qui me mets au centre en essayant de rapprocher les autres de moi. C’est l’autre qui est au centre et c’est moi qui travaille pour me rapprocher de lui. La réponse dépend de moi et je n’ai jamais fini d’y répondre. L’amour n’a de limites que celles que nous lui donnons.
Jacques NOIROT, sma
[1] Cf. Jn 6, 63c. 68c.