Expérience du Confinement à la Communauté SMA de Haguenau
Nous sommes au 21 Mars 2020. Cela fait treize jours qu’à la Communauté des Missions Africaines de Haguenau, nous ne sommes plus sortis. On dirait que nous sommes des missionnaires qui ont décidé de devenir des moines cloitrés dans leur monastère.
Eh bien, ce temps nous a permis bon gré mal gré de participer à cette vocation spéciale qui est la leur. Belle manière de vivre, pourtant nous y sommes obligés par ce vent particulier de la pandémie du Coronavirus qui souffle autour de nous. Nous étions devenus des cas-contacts direct et indirect et avions résolu de donner notre participation à la vie du monde en respectant scrupuleusement notre confinement de 14 jours dans l’espoir d’en sortir indemnes.
Quand la recommandation nous fut faite au soir du dimanche 08 mars de rester tranquillement chez nous, nos esprits étaient troublés. Nous avions déjà prévu des activités pour la semaine à venir. Certains d’entre nous pensaient aux cours à l’université, d’autres au stage qu’ils rataient suivi du doute sur la validation de leur UE ; certains autres à leur rendez-vous de la semaine chez le médecin, d’autres encore étaient surpris à l’idée qu’ils ne pouvaient plus honorer leurs invitations et devaient annuler leurs voyages. Nous étions même arrivés à douter de notre capacité à pouvoir rester chez nous et nous nous demandions : qu’allions nous faire pendant tout ce temps ? L’avenir nous est incertain jusqu’à ce qu’il devienne au moins notre présent.
Pourtant, chaque fois qu’il s’est décidé à devenir notre présent, nous avions décidé d’en faire ce que nous pouvions. Les jours se sont suivis en respectant leur durée et nous, nous avions adapté notre danse à leur nouveau rythme. Nous les avions passé à lire, à étudier, à écrire, à prier et à nous reposer. Nous avions passé ce temps, d’aucuns à préparer le jardin pour la bonne saison, d’autres à faire la cuisine et d’autres encore à appeler les vieux amis et à se nourrir d’espoir. Nous avions retrouvé un nouveau goût de la vie communautaire qui s’exprime par la présence réciproque des uns auprès des autres dans le service.
Voilà qu’au milieu de cette vie communautaire calme et bien garnie, la nature nous réveille avec le silence des fleurs qui poussent autour de la maison, des arbres qui bourgeonnent et des chants des oiseaux qui nous ont tant manqué pendant l’hiver. Le printemps est là. L’espoir de la beauté verdoyante de notre environnement renaît. Elle nous dit que bientôt, la tristesse sera finie et que la vie continuera son cours en reflétant sa joie sur nos visages.
Mais de ce temps, nous aurions appris des leçons qu’il serait important de retenir. Il nous aurait appris que nous passions notre temps à nous encombrer des choses qui ne sont pas essentielles alors que nous pouvions vraiment vivre une vie juste avec le minimum nécessaire. Que nous prenions notre temps à vadrouiller partout et à tout faire sans rien faire d’indispensable et donc que nous sommes tous utiles sans être pourtant indispensables. Il nous aurait appris que Dieu qui a été démis de ces fonctions d’architecte continue de faire tourner la vie même quand nous sommes confinés. Que nous pouvons beaucoup mais ne pouvons pas tout. Ainsi notre vie continuera avec un brin d’humilité que nous aurions à passer comme relais aux autres.
Enfin notre temps de confinement particulier est à sa fin. Nous avions nourri l’espoir de pouvoir sortir. Mais non, nous ne le pouvons pas. Nos rues sont désertes. Où pourrions-nous aller ? Chez nous, le slogan est clair : Restez à la maison ! Eh Oui, nous allons continuer à mener notre vie monastique tout en nourrissant l’espoir que bientôt nous nous retrouverons et parlerons de tout ceci comme un élément de nos souvenirs.
Jacob Schiméa Senou